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Photo du rédacteurDr Daniel Bouhnik

Orthodontie et Parodontie



Comme nous avons pu le voir dans les articles précédents, le parcours de soin des patients dans le cadre d’un traitement d’orthodontie implique bien souvent l’intervention de nombreuses spécialités afin de proposer à nos patients une prise en charge globale et pluridisciplinaire, permettant d’optimiser la réussite des thérapeutiques mises en place.

Aujourd’hui nous allons nous intéresser à la relation étroite entre l’orthodontie et la parodontie; nous avons pour cela la chance d’avoir rencontré et interviewé Le Dr Benjamin Coyac, parodontiste spécialiste exerçant à Paris.


Quel est votre parcours professionnel / formation ?


Après ma formation initiale à l’Université Paris Descartes, conclue en 2012 avec les diplômes de chirurgien-dentiste et de Master 2 en immunologie/biologie cellulaire, j’ai effectué une année d’omnipratique en libéral et un assistanat au Karolinska de Stockholm.

En 2017, j’ai été diplômé de la Fédération Européenne de Parodontologie pour la spécialité préparée à l’hôpital Rothschild/Garancière sous la direction du Pr Bouchard, et d’un doctorat de sciences réalisé en parallèle à l’Université Paris Descartes sous la direction du Pr Chaussain.

Enfin, ces 3 dernières années, j’ai réalisé un postdoctorat au service de chirurgie plastique et reconstructrice à l’Université Stanford en Californie sous la direction du Pr Jill Helms.


Quel est en parodontie votre domaine de prédilection?


La parodontie étant déjà une spécialité, je dirais que la parodontie en générale est mon domaine de prédilection ! Plus spécifiquement, au niveau clinique, j’aime beaucoup le travail de diagnostic, de pronostic et de microchirurgie des traitements de recouvrement des récessions gingivales.


Je pense que la part de sens clinique ainsi que la compétence individuelle de chaque praticien sont particulièrement pertinentes dans ce type de soins.


Qu'est-ce que la parodontie ?


La parodontie est la pratique clinique de la parodontologie. La parodontologie correspond à la science du parodonte, c’est-à-dire aux 4 tissus de soutien de la dent :

  • l’os alvéolaire, qui constitue l’alvéole où la dent est enchâssée dans la machoire,

  • la gencive, c’est le tissu rose que l'on peut voir autour des dents, et qui recouvre l’os alvéolaire,

  • le cément radiculaire, c’est une couche minéralisée qui recouvre la racine des dents,

  • le ligament parodontal, qui relie relie la dent et l'os, c'est lui qui donne la possibilité aux dents de transmettre les informations comme la pression que l’on ressent lorsque l’on sert les dents par exemple.




Cet appareil d’ancrage de la dent est sujet à un ensemble de pathologies parmi lesquelles on retrouve les gingivites et les parodontites. La parodontie consiste au diagnostic, au pronostic et au traitement des maladies parodontales et des implants dentaires.


En quoi parodontie et orthodontie sont-elles liées ?


Tout d’abord anatomiquement, toutes les spécialités dentaires sont reliées, à mon avis il est important d’avoir une vision globale des dents et de leur environnement.


Concernant les liens particuliers entre la parodontie et l’orthodontie, elles concernent directement toutes les deux l’attache de la dent (= appareil d’ancrage). Dans le cas de la parodontie, il s’agit de préserver ou de reconstruire cette attache, dans le cas de l’orthodontie, il s’agit de la mobiliser pour déplacer les dents. On a donc une interdépendance très forte de ces deux spécialités, car le déplacement orthodontique est strictement contre-indiqué en cas de pathologie parodontale.


Par ailleurs, les appareillages orthodontiques (bagues, braquettes etc.) constituent des facteurs de rétention (accumulation) de plaque dentaire majeurs, et représentent donc un facteur de risque parodontal (et carieux…).


Pourquoi est-il important de ne pas commencer un traitement d'orthodontie si une parodontite est en cours ?


Les mouvements d'orthodontie consistent à déplacer la dent, c'est-à-dire à remodeler son système d'ancrage de façon à ce que la dent passe d'un point A à un point B, sans perdre ni os, ni ligament.

La parodontite étant avant tout l'inflammation et la destruction irréversible du système d'ancrage de la dent (os + gencive), si des mouvements orthodontiques s'ajoutent à la parodontite, la destruction du système d'ancrage est accélérée et aggravée.

En plus de cet aspect iatrogène (délétère) de l'orthodontie sur un parodonte pathologique (malade), les bagues et les brackets sont un véritable défi pour l'hygiène plus que parfaite qui est recommandée à un patient "parodontal".

En revanche, lorsque la parodontite est traitée, et même si peu d'ancrage demeure autour des racines, un traitement orthodontique peut parfaitement se faire, même en cas d'antécédent de parodontite très sévère, la récidive éventuelle d'une parodontite devra alors être surveillée de près avec des contrôles réguliers et les mouvements seront adaptés au parodonte réduit.


Concernant justement le facteur de rétention de plaque, que pensez-vous de l’orthodontie par gouttières (Invisalign…) ?


Ces gouttières pouvant être retirées à tout moment, facilitent l’hygiène dentaire et donc le contrôle de la plaque. Ainsi, à condition de ne pas recouvrir les contours de la gencive avec ces gouttières, cette modalité de traitement me paraît très avantageuse, une étude va d’ailleurs dans ce sens (1).

Cependant, même avec des bagues, il est possible d’entretenir une hygiène adéquate. Cela demandera plus d’efforts et de dextérité de la part du patient.

Le facteur le plus critique, à mon avis, réside dans la motivation du patient et dans son sérieux vis-à-vis du brossage dentaire et inter-dentaire.






Qu’est-ce qu’une parodontite (ou maladie des gencives) et quels en sont les traitements ?


Vaste question ! La parodontite est un syndrome inflammatoire d’origine infectieuse. Elle consiste en une perte d’attache irréversible. Concrètement, cela signifie que la dent en elle-même n’est pas affectée, mais les tissus qui la retiennent à la mâchoire sont détruits, entrainant in fine des mobilités dentaires, jusqu’à l’expulsion de la dent.


Son origine est diverse : elle se développe sur un terrain génétique défavorable et se déclenche avec des facteurs de risque bien déterminés,

  • la présence de plaque dentaire,

  • la consommation de tabac,

  • le diabète non équilibrée.


En dehors de ces facteurs de risque établis, il existe d’autres indicateurs de risque, corrélés à la parodontite, parmi lesquels on retrouve,

  • le stress non maitrisé,

  • l’obésité,

  • les carences nutritionnelles.

Enfin, cette pathologie comporte des facteurs aggravants, généraux ou locaux, notamment tous les facteurs de rétention de plaque dentaire comme les brackets orthodontiques, les prothèses ou les restaurations (plombages) défectueuses/débordantes.

Le traitement consiste avant tout à préserver ce qui peut l’être au moment du diagnostic et éventuellement à reconstruire ce qui a été perdu. On distingue 4 phases dans le traitement d’une parodontite :

1. L’entretien motivationnel : il consiste à informer le patient de son état parodontal, car la maladie est silencieuse, elle ne se voit pas et ne fait pas mal. Généralement, lorsque l’on observe des mobilité ou des déchaussements, c’est que la maladie est déjà à un stade avancé. L’éducation du patient au contrôle de ses facteurs de risque individuels, comme l’hygiène bucco-dentaire ou le tabac est à la base du traitement parodontal.

2. La thérapeutique mécanique et chimique : lorsque les facteurs de risque individuels sont parfaitement maitrisés par le patient, on réalisera alors un détartrage et un surfaçage (détartrage profond) en plusieurs séances, avec application locale d’antiseptiques. Cette phase de traitement pourra éventuellement être accompagnée d’une thérapeutique antibiotique.

3. La réévaluation et la thérapeutique chirurgicale : Au moins 6 semaines après la dernière séance de surfaçage, on réévaluera la situation parodontale. On va distinguer 2 scénarios:

  • le patient guéri : on passera alors à la thérapeutique parodontale de soutien,

  • le patient a amélioré sa situation, mais n’est pas encore guéri : on passera alors en phase chirurgicale, associée éventuellement à une procédure de régénération (greffe osseuse/facteurs de croissance).

4. Dernière étape, la thérapeutique parodontale de soutien : il s’agit de la phase la plus critique au maintien de l’état sain du patient guéri. Sans un contrôle à vie des facteurs de risque, la possibilité d’une rechute est permanente.







Qu’est ce qu'une récession gingivale ?


Une récession gingivale correspond à un déplacement de la gencive le long de la dent, découvrant la racine et donnant l’impression que la dent devient plus longue.


On va différencier plusieurs causes :

  • La cause infectieuse : lorsque la récession gingivale est une séquelle de la parodontite. Elle fait partie de ce qu’on appelle communément « le déchaussement », c’est le type de récessions pour lequel il existe le moins d’options thérapeutiques.

  • La cause mécanique : lorsque la récession gingivale est causée par un brossage traumatique/agressif : une brosse à dents à poils durs et/ou des mouvements de brossage inadaptés. Ce sont les récessions avec les meilleures chances de recouvrement, à condition d’éliminer en parallèle la cause traumatique.

  • La cause congénitale : lorsque l’insertion des freins des lèvres ou des joues se fait directement au niveau de la dent en l'absence d’interposition d’une gencive dont la structure est résistante et adaptée aux contraintes des mouvements de la mastication et de la phonation. Le traitement consiste alors à apporter de la gencive là où elle est localement inexistante et à éloigner les insertions iatrogènes des freins.

Ces causes ne sont pas exclusives les unes des autres, et peuvent se surajouter pour expliquer la présence de récessions gingivales.


Quelles sont les solutions face à des récessions gingivales ?


La solution va dépendre du type de récessions. Si l’indication est posée, on peut envisager une greffe gingivale. Ces greffes présentent le plus souvent un très bon pronostic avec possibilité de recouvrir tout ou partie de la récession.







Quelles sont les signes qui suggèrent la nécessité d’un traitement parodontal ?


Si le patient remarque des signes cliniques c’est que la pathologie est déjà avancée.

Il est donc capital de faire des contrôles réguliers chez son chirurgien-dentiste, tous les 6 mois afin d’intercepter l’apparition ou l’aggravation d’une parodontite.

Il est important d’allerter sur la part héréditaire de la susceptibilité parodontale : cela implique que certains patients vont être plus disposés génétiquement que d’autres à développer des pathologies parodontales. Les patients qui ont des parents, frères et sœurs ou oncles et tantes ayant perdu leurs dents “tôt“ sont à priori plus de risque de développer une parodontite eux-mêmes.

Les signes d’alertes principaux sont :

  • Une gencive gonflée, rouge et brillante. Normalement, la gencive est rose, mate et pictée (aspect peau d’orange)

  • Une gencive qui saigne au brossage ou spontanément,

  • Une mobilité dentaires sans raison sur une ou plusieurs dents,

  • Une apparition de récessions gingivales sur une ou plusieurs dents.




Quelles sont les mesures d’hygiène pour les patients à risque de parodontite ?


Ces patients vont devoir mettre en place des mesures d’hygiène bien plus rigoureuses que le reste la population.

Le brossage pourra être manuel ou électrique, mais il devra être vérifié et validé par le chirurgien-dentiste afin de s’assurer qu’aucun endroit ne soit omis lors du brossage.

Il est possible, au début, de s’aider d’un révélateur de plaque coloré afin de mettre en évidences les zones où la plaque n’a pas être élmiminée.

À ces mesure d’hygiène dentaire, il conviendra de rajouter les mesures d’hygiène inter-dentaire (entre les dents) avec des brossettes de plusieurs tailles pour arriver à un degré de contrôle de plaque maximum.

Le moindre résidu de plaque peut entrainer des conséquences pathologiques chez les patients susceptibles.

Le patient en cours de traitement orthodontique, d’autant plus s’il s’agit d’un traitement par « bagues », devra s’astreindre à une hygiène bucco-dentaire la plus stricte afin de ne pas mettre en péril le bon déroulement de son traitement et la santé de sa gencive.







A quelle âge peut-on avoir besoin d’une prise en charge parodontale ?


Il existe plusieurs formes de parodontites.

Chez le patient jeune, on retrouve surtout des formes localisées et agressives (rapides), elles sont plutôt rares, le facteur génétique y est prédominant, la composante ethnique également.

Les formes plus lentes et chroniques de la maladie sont beaucoup plus fréquentes, mais leurs effets sont visibles plus tard, d’où l’importance d’un contrôle régulier chez son chirurgien-dentiste.


Comment se déroule une consultation de parodontie ?


Les signes d’alerte ont souvent été relevés par le chirurgien-dentiste omnipraticien ou orthodontiste. La première consultation parodontale consiste alors en une anamnèse pour identifier les facteurs de risque, puis en un sondage parodontal pour évaluer l’activité de la maladie et l’importance des pertes d’attache. On réalisera ensuite des examens complémentaires radiographiques afin d’évaluer le niveau osseux.

Ces mesures permettent de réaliser un diagnostic, un pronostic et de proposer un traitement adapté au patient.


A quelle moment du traitement d'orthodontie est-il recommandé de mettre en place un suivi parodontal ?


Dans aucun cas un traitement orthodontique ne peut pas être entrepris en présence d’une parodontite active. Si le diagnostic de parodontite se fait en cours de traitement orthodontique, il sera recommandé d’interrompre ou d’arrêter le traitement orthodontique. Lorsque le traitement sera repris, des mouvements particulièrement lents seront alors indiqués.

En présence de récessions gingivales pour cause de défaut congénital/ absence de gencive, le parodontiste pourra décider, en fonction des déplacements envisagés par l’orthodontiste, d’intervenir avant ou après le traitement orthodontique.


Quelles sont les clés d’une prise en charge parodontale réussie ?

La clé d’un traitement réussi est le contrôle des facteurs de risque. C’est également la clé du succès et de la pérennisation des résultats obtenus par un traitement parodontal, quel qu’il soit.



Dans le cabinet du Docteur Daniel Bouhnik , orthodontiste à Saint Ouen (93), nous comprenons les enjeux et l’importance d’une bonne santé dentaire à tout âge. Nous mettons en œuvre tout notre savoir-faire et notre expérience au service de votre bien-être et de votre santé bucco-dentaire.


Reference : 1. Azaripour A, Weusmann J, Mahmoodi B, et al. Braces versus Invisalign®: gingival parameters and patients' satisfaction during treatment: a cross-sectional study. BMC Oral Health. 2015;15:69. Published 2015 Jun 24. doi:10.1186/s12903-015-0060-4








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